Pas D'atom

30 Mars En route pour Konya Urgench

5h du matin. On a bien dormi dans le train, malgré la chaleur du compartiment. Moyennant une ou deux tablettes de chocolat, Batir a obtenu de l'eau chaude de la part du provodnitsa. On peut boire notre nescafé rituel agrémenté de quelques biscuits. Batir nous demande s'il peut prendre quelques doses de nescafé pour sa femme qui adore ça. Bons princes et princesses, nous lui en donnons presque un paquet entier. Tant pis pour notre réserve.
Il est 6h30 lorsque nous arrivons à la gare d'Achgabat. En russe la salle d'attente d'une gare s'appelle vaux hall qui veut dire la salle vocale parce qu’il s'y donnait des concerts pour ne pas que les gens de la haute société s'ennuient en attendant le train. En anglais d'où il est issu, ce mot désigne une salle de danse ou de concert.
A la sortie nous retrouvons nos 4X4 et nos chauffeurs préférés. Les pauvres sont tombés en panne (une des voitures) après leur départ de Turkmenbashi il y a 48h. Ils ont mis15h pour faire le trajet et n'ont pas pu se reposer comme ils l'espéraient. Nous voilà partis pour 680 km dans le désert du Karakum (10h de route au minimum) pour rejoindre, dans le nord, la ville de Dashoguz au bord de l'Amou Daria.
On passe d'abord chez Batir qui veut embrasser sa femme et son fils et offrir à cette dernière le nescafé.
En remerciements, elle nous a préparé un gâteau qui a l'air appétissant.
Après un arrêt traditionnel à la station service, on fonce dans le désert.Je ne comprends pas que les chauffeurs n'aient pas pris l'essence la vieille au soir. Vincent pense que c'est pour prouver qu'il ne se servent pas de l'essence lorsque nous ne sommes pas là. Je n'en suis pas si sûr. Au bout de deux heures on s'arrête en plein désert pour une courte pose. Il ne fait que 8°C et l’atmosphère est très humide. Batir nous dit que nous somme très près d'une prison secrète réservée aux politiques. La route est rectiligne, le paysage monotone. On s'arrête ensuite dans un petit village pour acheter du pain et de l'eau. C'est un village typique du pays avec yourtes et fours à pain. On fait quelques photos.
 A côté du four à pain il y a des tas de bois de saxaoul.

Le four est chauffé soit avec du bois soit avec du gaz. Lorsqu'il est suffisamment chaud, on pose la pâte sur les briques à l'intérieur.
Les yourtes turkmènes sont plus importantes que les yourtes mongoles. Peut-être parce que les turkmènes sont des semi nomades.Celle-ci a même la porte ornée d'une grille en fer forgé.
Nous continuons notre route monotone. Vers le milieu du parcours nous arrivons aux environs de Darvaza à la frontière entre la province de Ahal et celle de Dashoguz.. après avoir quitté la route principale pour une piste pas évidente à voir, nous arrivons devant un cratère d'une cinquantaine de mètres de diamètre. Au fond il y a de l'eau avec de grosses bulles qui éclatent régulièrement.
 Il s'agit d'un puits de prospection de gaz abandonné car la production a été jugée trop faible. Il ne faut pas trop s'approcher du bord car le sol est très friable.
5 minutes plus loin de trouve un cratère similaire d'une soixantaine de mètres de diamètre. Celui-ci a une autre origine. Il s'agit d'une exploitation de gaz qui a explosé dans les années 60. Depuis le gaz qui en sort brûle.


 Cela étonne nos compagnons qui ne comprennent pas ce gaspillage. Pourquoi les autorités ne font-elles rien pour colmater la fuite? Peut-être que les sommes nécessaires seraient trop importantes et qu'il vaut mieux laisser faire lorsqu'on a une telle production nationale de gaz. Décidément pour eux c'est un pays de sauvages. Ils oublient qu'aux USA les compagnies pétrolières laissent bruler des quantités considérables de gaz issus du forage de puits pétroliers car non rentables.
Ça pu vraiment le gaz au bord du cratère et on l'entend sortir comme d'un énorme réchaud. Ce n'est pas plus impressionnant que cela. Il parait que c'est plus joli la nuit et qu'il y a des touristes qui viennent y camper pour jouir du spectacle. Les gens du coin appellent ce lieu les bouches du diable car ils pensent que ce sont de mauvais esprits qui en sortent.
On reprend notre route pour s'arrêter quelques minutes plus loin pour notre picnic de midi. Au menu saucisson de poulet, pain local avec caviar d'aubergine en boite, fromage, mandarines et chocolat. Il fait très beau aujourd'hui. La température devient agréable, autour de 20°C.
C'est reparti. On quitte la bonne route pour une route complètement défoncée. On passe devant des ruines qui ressemblent aux restes d'un caravan sérail. Évidement notre guide ne connait pas, donc on ne s'arrête pas.
 Batir commence à m’énerver. Il ne quitte plus sa place à l'avant du premier véhicule, pour comme Vincent le fait régulièrement, se mêler à nous et nous parler de son pays. Il préfère fumer en toute tranquillité.
En plein désert, il y a des cultures de riz. C'est un contresens écologique.
 Plus loin on voit le canal qui sert à irriguer ces cultures.
Ses eaux sont détournées de l'Amou Daria à quelques kilomètres de là. Il a un débit énorme.Voilà où passe la mer d'Aral!
Après des heures de cette route horrible nous arrivons à Konya Urgench ou ce qu'il en reste. Konya Urgench, située dans une ancienne oasis au bord de l'Amou Daria a été la capitale de l'empire du Khorezm au sud de la mer d'Aral..Cet empire musulman a été très florissant entre le 11ème et 12ème siècle. Il était le siège de toute la science de l'époque. La ville a été détruite comme il se doit par les inévitables mongols puis quelques décennies plus tard par Tamerlan, un autre conquérant sanguinaire, musulman tout de même! Elle a été reconstruite mais la nature s'y est mise elle aussi. L'Amou Daria a changé le cours de son fleuve et la ville se retrouvant asséchée a périclité rapidement. Elle a été de nouveau reconstruite au 18ème siècle sur l'autre rive du fleuve, dans l’Ouzbékistan actuel, sous le nom de Urgench, Kiva maintenant  L'histoire est un peu schématique et raccourcie. Les personnes intéressées peuvent consulter les nombreux sites sur Internet qui s'y reportent. Ils y trouveront par ailleurs de meilleures photos que les nôtres.
Le premier monument est le mausolée de Turabeg Khan, un des plus imposants monuments du pays avec un portail de 25m de haut.
Turabeg Khan était la fille de Uzbek Khan qui avait converti les mongols de la horde d'or à la religion musulmane.
Tous les scientistes sont frappés par les différents rapports de ce monument avec notre calendrier.
La coupole contient 365 figures géométriques entremêlées représentant les jours de l'année.
Il y a 24 arches suggérant les heures de la journée et 12 arches les mois de l'année.
Et tout cela au 14éme siècle! Les mosaïques qui restent sont superbes
 Le minaret de Gutlug Timur du 11ème ou12ème siècle est le plus haut de l'Asie centrale avec ses 60m.

Le muezzin devait être un sportif pour monter là haut plusieurs fois par jour et faire ses appels à la prière. Peut être qu'à l'instar des gardiens de phare d’antan, il faisait des vacations continues de 15 jours sans descendre de là haut. Ceci dit les minarets servaient aussi de phare la nuit pour guider les caravanes dans le désert. Ce qui est étrange c'est la position de la porte à plusieurs mètres au dessus du sol. Elle devait être reliée à un autre bâtiment par une passerelle.
Le mausolée de Sultan Tekesh du 12ème siècle est en restauration. On ne peut le visiter, ou notre guide ne veut pas s'attarder. C'est selon.
Son dôme de tuiles turquoise lui a valu le surnom de Dôme bleu. L'absence de cénotaphe fait douter de son rôle de mausolée tout comme le précédent.
Face à nous se trouve une toute petite colline d'une vingtaine de mètres seulement et de quelques hectares . Elle porte le curieux nom de Kyrk Molla ce qui veut dire les 40 mollahs. Il s'agit des ruines d'une ancienne forteresse datant du 5ème siècle avant J.C et détruite par l'invasion arabe au 8ème siècle.Son nom peut vouloir dire qu'il s'agit d'une ancienne madrasa (école coranique). Une légende veut qu'à l'approche des mongols, toujours eux, les 40 religieux prièrent pour que les livres sacrés soient épargnés. Leurs prières ont été exaucées car la madrasa s'est écroulée et les livres ensevelis à tout jamais.Ce serait la, l'origine de la colline.C'est devenu maintenant un cimetière à l’atmosphère étrange. Il y a des centaines de tombes en forme de petits mausolées avec des échelles et des morceaux d'étoffe multicolores attachés à des perches.

Au milieu il y a des dizaines de petits ex-voto représentant des berceaux faits avec des morceaux de plastique de bois, de tissus.
Une femme désirant un enfant vient déposer son offrande afin d'être exaucée.Elles se met ensuite ce manteau
puis se laisse rouler au bas de la colline, ce qui parait-il augmentera sa fertilité, surtout si elles s'arrête devant une de ces 3 tombes, je ne sais plus laquelle..
On est loin du salafisme branche de l'islam pur et dur. On est dans le soufisme mâtiné d'animisme et de bouddhisme. C'est ça la route de la soie!
Du haut de la colline les monuments visités semblent entourés de neige. Il s'agit en fait du sel qui remonte à la surface.
Après cette visite éclair, il nous faut repartir. On a encore 80 km à faire dont une bonne moitié sur une route défoncée et il est déjà 19h.
 Après avoir longé l'Amou Daria quelques temps, nous arrivons à Dashoguz vers 21h30, un peu fatigués par tant de route. L’hôtel  Uzboy a l'air un peu minable mais ça ira.
Le repas du soir, expédié rapidement est correct à base de plov et de soupe de ravioli. On va vite essayer de dormir maintenant.

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